vendredi 10 octobre 2008

Hystérie individuelle

Image from web-libre.org


Pour l'hystérique, le monde est une vaste scène, et les autres, un public à toucher et à séduire.



Notre besoin de nous interroger sur le désir de l'autre, de quêter son approbation - "Que me veux-tu? Que suis-je pour toi? Quelle est ma valeur?" - serait un effet majeur de l'hystérie en nous. La personne qui en souffre, tout en le sollicitant, est rapidement effrayée par ce désir. Pour le mettre à distance et apaiser l'angoisse que lui inspire le sexe, trop réel, trop bestial, elle transforme son existance en vaste théatre où tout n'est que faux-semblants...

Nous rêvons souvent d'être un autre, de changer d'identité... Pour l'hystérique, la méconnaissance inconsciente de son identité sexuelle facilite l'accomplissement de ce rêve! Refusant d'être limitée par le réel, elle revendique le droit d'être qui elle a envie d'être, et enchaîne les rôles. Garçon manqué au réveil, elle devient femme fatale à l'heure de l'apéritif et s'effondre à 22 heures, fantasmant de n'être qu'une loque rejetée de tous. Elle est psychiquement homme et femme, yin et yang, active et passive. D'où ses stratégies amoureuses déconcertantes : séduire activement, s'offrir passivement et s'enfuir dès que l'autre s'approche. Elle érotise les rapports humains les plus anodins. Mais au fond d'elle-même, n'aspire qu'à l'amour pur. Elle ne cesse d'intriguer, de jouer les mystérieuses, mais exige d'être reconnue au-delà des masques dont elle s'affuble.

L'insatisfaction est notre lot à tous, mais la personne hystérique, elle, l'érige en mode de vie, toujours prisonnière de ses rêveries oedipiennes inassouvies. Plus son entourage tente de lui faire plaisir, plus au lieu de se réjouir, elle pense à tout ce qui lui manque. Le jour où, enfin, l'être qu'elle désire lui fait signe, elle cesse aussitôt d'être amoureuse. L'angoisse qui nous étreint parfois à l'idée que, si nous avions tout, nous n'aurions plus rien à attendre de l'existence, prend chez elle des proportions inquiétantes. Elle s'imagine que comblée, elle mourrait d'ennui.

Comme l'anorexie, l'hystérie est très majoritairement féminine.


(Psychologies Magazine juillet-août 2008)


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire